Dans Tintin en Amérique :
Voici les évènements de la journée d’hier, d’après le professeur W.R. Law, [...] 150 gallons d’eau de Javel champagnisée ont été saisis par la police : le Coroner et 29 policiers sont à l’hôpital…
[ Tintin en Amérique (1932), Hergé, éd. Casterman, coll. Tintin, 1945, t. 3, p. 36 ]
On trouve à « champagniser » un commentaire sur la graphie et la prononciation :
Champagniser, verbe trans. Préparer des vins blancs de crus divers selon la méthode champenoise (cf. Ali-Bab, Gastr. pratique, 1907, p. 154). Vins de Touraine champanisés [sic] (A. Daudet, Immortel, 1888, p. 242).− [ʃ ɑ ̃paɳize]. La majorité des dict., surtout à partir de Guérin 1892, enregistrent champagniser. Besch. 1845 écrit uniquement champaniser. Cette forme est mentionnée ds Lar. 19e, Nouv. Lar. ill., Littré. Elle est empl. comme vedette à côté de champagniser ds Quillet 1965. Cette graph. traduit une altération dans la prononc. de l'articulation de [ɳ]. La nasale [ɳ] est altérée de l'a. fr. en passant par le m. fr. jusqu'au début du xviiies. On entendait ainsi à Paris [ano] à la place de [aɳo]. Cf. Bourc.-Bourc. 1967, § 198. En outre, G. Straka (Qq. obs. phonét. sur le lang. des femmes ds Orbis, 1952, t. 1, no2, pp. 340-345) fait la rem. suiv. au sujet de l'instabilité de [ɳ] qui est normalement occlusive et palatale : ,,Elle est tantôt palatale, tantôt vélaire, et quand elle est palatale, tantôt la pointe de la langue s'infléchit derrière les incisives inférieures (ce qui est normal), tantôt elle s'appuie contre les alvéoles et le palais dur; on peut encore observer, à côté de l'articulation occlusive de l'ɳ, une articulation plus ou moins relâchée et constrictive. Nous avons attribué l'instabilité de cette consonne au fait qu'en tant que palatale, elle se trouve actuellement isolée dans le système phonétique du français.`` G. Straka (ibid.) souligne que la consonne est plus souvent atteinte chez les femmes que chez les hommes, ce qu'il explique par l'énergie articulatoire que requiert la prononc. de cette consonne, énergie qui est moins forte chez les femmes que chez les hommes. − 1res attest. 1839 (Boiste d'apr. Lar. Lang. fr.), av. 1845 champaniser (Dict. du comm. ds Besch. Suppl.), 1866 champagniser (Lar. 19e); de champagne2, suff. -iser*.
[ Trésor de la langue française informatisé (TLFi) - extrait de « champagniser » ]
- Sommairement, pourquoi l'ɳ se trouve-t-elle « isolée dans le système phonétique du français » ?
- Qu'entend-on par « atteinte » dans le contexte de la prononciation de la consonne ?
- Est-il de notoriété dans le domaine qu'il y ait une « énergie articulatoire » différente entre la femme et l'homme; est-ce que ça signifierait qu'on puisse attribuer ici historiquement la présence des deux graphies à une prononciation qui illustre cette différence, celle-ci disant davantage « champaniser » et celui-là, « champagniser »; quel est le lien le cas échéant entre ceci et la référence à Paris jusqu'au début du XVIIIe ?
/ma.liɲ/
mais populairement/ma.lin/
. La graphie « maline » est encore considérée incorrecte dans cet usage, mais pour combien de temps ? On pourrait se demander si les raisons de cette évolution sont les mêmes que pour ton exemple.