Dans une question on a exploré le genre d'une marque de boisson énergisante; et en commentaire on a aussi parlé des eaux minérales/gazeuses et on remarque qu'on dit « un Perrier ».1
Sommairement, c'est en 1906 qu'on donne le nom Perrier à la source en question (La compagnie de la Source Perrier). En 1870 on a le premier slogan : « La princesse des eaux de table » (Wikipedia); on peut en lire bien d'autres - voir 1946, variations sur 1870 « le champagne des eaux de table »; 1949 : « L’eau Perrier minérale, gazeuse naturelle,... ». Puis en 1994, pour la première fois si directement dans un tel contexte : « Et si l’homme se contentait de la violence d’un Perrier ? ». Mais sommes toutes bien des références à l'eau, à ses propriétés, et bien des mots au féminin. Et sur le site de l'embouteilleur, on parle de l'eau minérale et du gisement de l'eau Perrier : on ne mentionne pas « un Perrier ». Il y a ici sans doute une forme de gestion du sens de la marque de commerce.
On pourrait penser que ces détails ont pu avoir un impact sur l'emploi du genre de manière contemporaine. On peut fouiller dans les emplois au corpus Google (ngram). Par ailleurs, l'entrée la plus ancienne (que j'ai trouvée) est celle de 1935 de Madame Simonne Wiccaert avec « L'Afrique à vol d'oiseau: reportage aérien en Afrique septentrionale et centrale »:
« Boy, un Perrier glacé ! » — Un Perrier c'est l'eau minérale qu'on boit partout là-bas.
Certains extraits peuvent aussi être trompeurs. Mais donc, ce ne saurait être dû à l'impact d'une stratégie de réclame contemporaine en France ou sur le web. Dans un autre ordre d'idées on aura noté que Perrier c'est un patronyme usuel en France (et La Perrière, un toponyme); aussi que le nom commun existait (perrier, m, l'ouvrier à la carrière, l'engin de siège (une forme de trébuchet) etc.; aussi pierrière).
Question. Pourquoi dit-on, sans doute dès l'origine, « un Perrier »; et quel serait le générique sous-jacent ?2 A-t-on des exemples d'emploi avant 1935 ? Y a-t-il une règle ou un usage pour le « genre des marques » (dans le domaine de l'agroalimentaire/restauration); est-ce l'exception qui confirme une « règle » plus générale ?
1. L'idée d'utiliser le générique sous-jacent (eau, vin, champagne, boisson, soda, camion) pour déterminer le genre, c'est utile mais ça peut nécessiter l'apprentissage de détails. Mais pas dans le cas qui nous occupe (et assurément je suis le seul à avoir pensé qu'on aurait pu qualifier une eau Perrier de « soda ») : c'est une eau minérale.
2. Est-ce à cause de l'importance des marques associées aux appellations d'origine, dont les génériques sont: vins, champagnes, dont Perrier-Jouët, fromages (j'ai noté avec amusement dans Le Bon Usage (Grevisse, Goosse, ed. De Boeck Duculot) à 99.a.4 - « Fromage de Doubs, voisin du Munster (Rob., s.v. mont-d'or) »). Est-ce suite au genre d'un nom commun antérieur (perrier, m) ? Par opposition à des noms/toponymes comme La Perrière avec sa particule par exemple ? Ou pour personnifier le fondateur Monsieur Perrier ?