On a le hareng saur, le poisson salé/fumé, ayant subi le saurissage, dans le domaine agroalimentaire, par emprunt au moyen néerlandais soor « (bois, hareng) séché » (TLFi ; voir aussi Littré) ; enfin on comprend le rôle de la ficelle dans le poème de Charles Cros du même nom. Le francique saur, « d'un jaune qui tire sur le brun », y serait soit apparenté, soit apparenté au bas latin saura (peut-être utilisé pour gloser roux dans des descriptions ; voir ds. Roland texte, manuscrit : Li Marganices sist sur un ceval sor,) ou saurus (désignant des noms de poissons ; DHLF/Rey parle du rapprochement que fait Guiraud avec la base latine saur- qu'on trouve dans les dérivés en bas latin, et qui sert à « désigner des animaux à couleur mêlée de brun »). Il y a aussi des applications dans d'autres langues romanes. En résumé on a le hareng et la polysémie du saur avec possiblement le même étymon commun à tous. Voici deux harengs saurs, et le hareng est à l'origine azur avant son traitement, de sorte que le saur l'aura rendu saur, pour ainsi dire :
Image : Christopher Bertram (user: bristoleast) tirée de Wikipédia.
Ce glissement n'est pas sans évoquer le genre de transformation étrange qu'on peut trouver en héraldique avec le blasonnement, par exemple avec l'histoire de la couleur sable : c'est que la fourrure de zibeline (russe/polonais sobol'), normalement blanche, et bien on avait l'habitude de la teindre en noir ! Et donc ça veut dire noir dans ce contexte-là... C'est un emploi spécialisé, et non une concurrence usuelle avec la couleur qu'on pourrait associer au sable (beige clair).
L'acception de saur pour la couleur (jaune) tirant sur/mêlée de brun est-elle connue aujourd'hui généralement, est-ce d'un registre particulier ; le fait que ce soit plus ou moins réservé à la couleur d'un animal bien connu ou à des emplois spécialisés, que ça apparaisse dans l'œuvre de Cros ou avec le hareng généralement, qu'est-ce que ça permettrait de dire au sujet de l'usage/la perception qu'on fait/a de ce mot aujourd'hui ?
Connaît-on d'autres mots composés, plutôt figés, qui contiennent un nom qui peut référer à une couleur inusitée, ou qui n'est plus généralement sentie comme une couleur usuellement, différemment du vert-de-gris, et plutôt tel que le saur du hareng saur peut l'être (on exclura le ti-caille, du Québec) ?
Y a-t-il des exemples en français de mots basés sur saur- qui témoigneraient de la couleur particulière dont on vient de discuter plutôt que (de celle) du lézard/des mots savants qui semblent l'avoir supplantée, et qui illustreraient en français la conséquence du propos de P. Guiraud mentionné au DHLF ?