Les sentiments de cette sorte, que l'on pourrait considérer comme ambigus, mais que l'on caractérisera parfois comme étant des sentiments mitigés, proviennent tout simplement des réalités matérielles de l'existence, comme dans l'exemple qui sera utilisé à la fin du présent paragraphe, et des notions culturelles acquises, lesquelles peuvent être, plutôt qu'un concours de principes purs, seulement celui de principes contradictoires ou à caractère positif pour les uns et négatif pour les autres ; on a souvent à considérer le pour et le contre d'une situation, d'une décision. Certaines des notions qui mènent notre existence sont de cette nature. Par exemple, l'une des plus inéluctables des notions de cette catégorie, celle de la survie, dans le domaine de la médecine, explique des commentaires tels que « Il fut intimé de la triste et heureuse vérité qu'il sauverait sa vie au prix de l'amputation de sa jambe malade. ».
Les notions particulières considérées dans cette question (qui vise le contexte d'une nomination, d'une remise de prix ou d'une décoration) peuvent être celles du mérite ou de la grandeur. Le mérite personnel est souvent reconnu comme ayant deux sources, l'une vraiment personnelle et l'autre tout à fait extérieure, bien que souvent aussi ce point de vue soit discutable. L'aspect moral que cela évoque peut être simplement celui de la fierté sans dérive négative, en particulier la dérive qui consiste à tomber facilement dans l'orgueil, ou au contraire ce peut être l'orgueil ; disons en passant que c'est un point de vue que peut-être on doit entièrement à la culture chrétienne mais qui de nos jours peut être admis comme étant un apanage de la fondation laïque de la culture prise globalement, et aussi un apanage de la moralité chrétienne, avec laquelle rivalise la moralité laïque.
Sans plus de contexte qu'il n'en est fourni dans la question l'explication de l'apparente antinomie doit pouvoir se faire selon l'une ou l'autre de ces deux notions. La fierté est donc soit motivée par le mérite dans la réussite soit par la grandeur de la réussite. S'il s'agit de mérite, plutôt que de s'expliquer par une position purement morale l'humilité s'explique, du fait de cette part d'effort qui n'est pas personnelle mais qui provient de l'extérieur, par la nécessité d'une prise en compte de quoi revient à qui, et elle réside donc dans la conscience que l'on ne fait que partager le mérite ; s'il s'agit de grandeur, l'humilité est justifiée sur la base de l'aspect purement moral que se laisser aller à l'orgueil reste une très mauvaise façon de se conduire.