Pour parler enfin plus expressément des amants, qui sont les plus intéressants et dont le narrateur est peut-être mieux placé pour parler, ils se trouvaient tourmentés encore par d'autres angoisses au nombre desquelles il faut signaler le remords. Cette situation, en effet, leur permettait de considérer leur sentiment avec une sorte de fiévreuse objectivité. Et il était rare que, dans ces occasions, leurs propres défaillances ne leur apparussent pas clairement. Ils en trouvaient la première occasion dans la difficulté qu'ils avaient à imaginer précisément les faits et gestes de l'absent. Ils déploraient alors l'ignorance où ils étaient de son emploi du temps ; ils s'accusaient de la légèreté avec laquelle ils avaient négligé de s'en informer et feint de croire que, pour un être qui aime, l'emploi du temps de l'aimé n'est pas la source de toutes les joies. Il leur était facile, à partir de ce moment, de remonter dans leur amour et d'en examiner les imperfections. En temps ordinaire, nous savions tous, consciemment ou non, qu'il n'est pas d'amour qui ne puisse se surpasser, et nous acceptions pourtant, avec plus ou moins de tranquillité, que le nôtre demeurât médiocre. Mais le souvenir est plus exigeant. Et, de façon très conséquente, ce malheur qui nous venait de l'extérieur et qui frappait toute une ville, ne nous apportait pas seulement une souffrance injuste dont nous aurions pu nous indigner. Il nous provoquait aussi à nous faire souffrir nous-mêmes et nous faisait ainsi consentir à la douleur. C'était là une des façons qu'avait la maladie de détourner l'attention et de brouiller les cartes.
Comment doit-on comprendre la partie en caractères gras et pourquoi ?
- 1/ « à tel point qu'il nous faisait souffrir aussi » ?
- 2/ « dans le but de nous forcer à nous infliger nous-même de la souffrance »
- 3/ « à prendre une attitude par laquelle nous acceptions l'image qu'on s'était faite de nous même » ?
Au « 2/ » et au « 3/ », le phrasé peut être modifié si on pense ainsi améliorer l'interprétation.