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Dans une lettre à Mme de Grignan (16 juin 1677), Mme de Sévigné écrit :

J’attends encore de vos nouvelles de Chalon et de Lyon. Je viens de recevoir le petit billet du grand M. des Issarts. Il vous a vue et regardée ; vous lui avez parlé, vous l’avez assuré que vous êtes mieux. Je voudrais que vous sussiez comme il me paraît heureux, et ce que je ne donnerais point déjà pour avoir cette joie.

Je ne comprends pas très bien le sens du subjonctif imparfait ici.

Serait-il possible de remplacer l'imparfait du subjonctif par le présent du subjonctif (que vous sachiez) dans la citation ci-dessus ?

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    Ah là là, le français avec ses conjugaisons qui peuvent sonner bien étrange hors contexte.
    – Simon
    Commented Dec 13, 2021 at 21:38
  • Oui, il m'est vraiment difficile de comprendre cette conjugaison !
    – user23005
    Commented Dec 13, 2021 at 21:40
  • • Le subjonctif imparfait devrait s’employer dans une proposition subordonnée, pour indiquer la simultanéité ou la postériorité d’une action par rapport à l’action de la principale, lorsque celle-ci est au passé. bescherelle.com/lemploi-du-subjonctif-imparfait
    – Lambie
    Commented Dec 13, 2021 at 21:48
  • Aujourd'hui on dirait sachiez, oui.
    – Lambie
    Commented Dec 13, 2021 at 21:49
  • @Lambie D'accord, mais pourquoi existe-t-il différents temps au subjonctif alors qu'un pourrait remplacer l'autre ? (ici, d'après l'exemple donné, le présent et l'imparfait)
    – user23005
    Commented Dec 13, 2021 at 22:05

1 Answer 1

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C'est la concordance des temps normale : la proposition principale est au passé, syntaxiquement parlant, donc la proposition subordonnée aussi.

Voudrais est un conditionnel présent. La forme verbale qui sert de conditionnel en français est construite comme un futur du passé, et peut avoir ce sens, même si le sens hypothétique (un conditionnel au sens propre) est le plus courant. Par exemple, dans

Je savais qu'il deviendrait célèbre.

le verbe de la proposition principale « savais » est au passé, et l'action de la proposition subordonnée est dans le futur par rapport à celle de la proposition principale, donc le verbe de la subordonnée est au futur du passé, qui est le conditionnel présent : « deviendrait ».

Dans « je voudrais … », le mode conditionnel n'a ni le sens d'un futur du passé, ni celui d'une hypothèse, mais d'un amoindrissement : « je voudrais » est moins fort que « je veux », il est à peu près équivalent à « je souhaite ». Mais quel que soit le sens, le verbe est à un temps du passé, donc on utilise un temps du passé dans la subordonnée.

Je veux que vous sachiez …   (présent / présent)
Je voulais que vous sussiez …   (passé / passé)
Je voudrais que vous sussiez …   (futur du passé / passé)

En français moderne, le subjonctif imparfait a presque complètement disparu : on ne l'utilise plus dans la langue courante, et plus beaucoup dans la langue soutenue. Il est donc parfaitement normal de dire et d'écrire

Je voulais que vous sachiez …
Je voudrais que vous sachiez …

Mais au 17e siècle, on utilisait le subjonctif imparfait normalement (au moins dans la langue soutenue).

P.S. pour comprendre « ses conjugaisons qui peuvent sonner bien étrange hors contexte » : sussiez est une forme quasiment disparue du verbe savoir, mais a la même prononciation que suciez du verbe sucer. Et sucer a en général un complément d'object direct, à l'exception notable de son sens sexuel.

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    Techniquement, il voudrait qu'on le sache, mais dans le passé. Donc en réalité on peut comprendre dans une forme moderne "j'aurais voulu que vous sachiez", non?
    – Simon
    Commented Dec 13, 2021 at 23:36

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