Il y a une variation régionale, oui.
Historiquement, les séquences voyelles + schwa en fin de mot ont donné naissance à des voyelles longues quand ces schwas finaux ont cessé d'être prononcé. Cette distinction permettait effectivement de différencier le masculin et le féminin des participes passés (aidé /ede/ aidée /edeː/, vu /vy/ vue /vyː/, ébahi /ebai/ ébahie /ebaiː/) mais aussi des formes verbales finies (il voit /ivwa/ ils voient, qu'il voie /iwwa:/) et des noms (le bout /bu/ la boue /buː/).
La plupart des dialectes du français ont perdu ces distinctions de longueur durant le 19ème siècle, mais elle se maintiennent toujours dans le nord-est de la francophonie européenne, dans un arc allant de la Belgique à la Suisse en passant par la Lorraine et l'Alsace.
Dans ces variétés, la différence est marquée, les voyelles longues étant deux fois plus longues que les voyelles courtes, et parfois diphtonguées ([edeːj]). Dans un étude comparative des français de Suisse et de France, Grosjean et al. a trouvé que dans des paires de mots comme ami/amie, pointu/pointue, aimé/aimée, les participants parisiens ont prononcés la voyelle finale des mots masculins avec un longueur moyenne de 169 ms et celle des mots féminins avec une longueur moyenne de 178 ms (on considère en générale qu'une distinction de longueur doit être de plus de 10% pour être perceptible). Les participants suisses, par contre, ont prononcés les mots masculins avec une voyelle finale d'une longueur moyenne de 150 ms, tandis que celle des mots féminins avait une longueur moyenne de 342s, soit une augmentation de 128%!
La même étude a aussi trouvé que, présentés avec un mot prononcé avec voyelle longue (par exemple, /ʒɔliː/), les suisses l'identifiaient correctement (comme étant, dans mon exemple, jolie) dans 86% des cas, tandis que les parisiens ne le faisaient que dans 43% des cas (en d'autres termes, en répondant au hasard entre les deux choix donnés, joli et jolie).
Ces distinctions de longueur sont donc produites et perçues par les suisses (et donc porteuse de sens), mais ni produites ni perçues par les parisiens.
(Pour donner une idée de la distinction à ceux qui ne l'ont pas, je prononce "Brie" identiquement à "brille", et les oppose à "bris")
Source: François Grosjean et al. Long and short vowels in Swiss French: Their production and perception, 2007, DOI: https://doi.org/10.1017/S0959269506002626